Une voie difficile
Si vous cherchez une voie rapide et facile vers un plus grand bonheur, vous n’avez pas choisi de vivre dans le bon univers. Trouver le bon univers risque de vous prendre pas mal de temps, aussi vaudrait-il mieux que vous preniez le taureau par les cornes et essayiez de lâcher prise de toute préconception selon laquelle vous allez pouvoir changer sans rien avoir à faire.
Ceci n’est pas pour dire que l’on ne trouve pas de grandes joies le long du chemin. En fait, quoique le changement ait son lot de défis, il apporte aussi de grandes joies, tout comme une randonnée peut être en même temps difficile et vivifiante et agréable. Mais il est certain qu’il y a des défis. Parfois vous serez désespéré par la lenteur de votre changement. Parfois vous serez complètement confus. Parfois vous aurez envie de tout arrêter.
Tous ces obstacles ne sont en fait pas du tout des obstacles. Ce ne sont pas rochers bloquant votre chemin, mais des marches à monter pour avancer. Ce sont des occasions de mieux vous connaître vous-même, et de développer fermeté, courage et patience.
Vos difficultés seront vos plus grands maîtres, car c’est quand nous atteignons nos limites que, le plus souvent, nous apprenons le plus au sujet de nous-même. Et nos limites sont ce que nous croyons être nos limites, car souvent nous découvrons qu’elles ne sont qu’illusoires. Nous sommes tous capables de bien plus que nous ne le savons. Tout défi à notre patience est une occasion d’augmenter notre compréhension de ce que nous sommes capables de faire. Cela nous pousse à avoir une meilleure compréhension et une plus grande acceptation de nous-même et des autres, ainsi qu’à relâcher notre résistance au changement.
Se désespérer à la lenteur des changements dont nous faisons l’expérience est une occasion d’apprendre au sujet de nos préconceptions quant à ce qui, pensons-nous, devrait se produire : c’est aussi une occasion d’apprendre à accepter ce qui est. Tout véritable artiste doit intimement connaître son matériel, et savoir comment il fonctionnera dans telle ou telle circonstance. En tant qu’être humain voulant se développer, nous devons apprendre à connaître la nature du matériel avec lequel nous travaillons, et dans la méditation ce matériel est notre propre esprit. Ce serait merveilleux si la nature de notre esprit était telle que nous puissions pousser un bouton et être heureux. Mais les choses ne sont pas ainsi. Le désespoir naît quand nous avons une fausse compréhension de la vitesse du changement, ou des conditions qui sont nécessaires à ce changement. De manière évidente, c’est une des choses importantes que nous pouvons apprendre par la méditation.
Plutôt qu’être vus comme des expériences d’échec, le doute et la confusion peuvent être considérés comme une partie saine du changement. Nous devenons confus quand nous laissons derrière nous un ensemble de préconceptions et de présuppositions, mais que nous n’avons pas encore trouvé une nouvelle manière, plus vraie, de voir et de comprendre les choses. C’est un signe de progrès et non d’échec.
De façon ultime, toute souffrance est un message nous disant que nous avons quelque chose à apprendre, qu’il y a une capacité que nous ne maîtrisons pas encore, que nous avons une idée fausse, ou que nous avons une façon de nous comporter qui ne produit pas les résultats que nous escomptons.
Dans une forme de psychologie, on dit qu’il n’y a pas d’échec, mais seulement des retours, du feedback. Je crois que ceci est vrai en méditation. Si nous n’aimons pas ce dont nous faisons l’expérience en méditation, ce n’est pas un signe que nous ne somme pas fait pour la méditation ou qu’il nous faut trouver une autre pratique de méditation, mais que nous avons encore quelque chose à apprendre. Et, de plus, il y a souvent quelque chose qui nous indique ce que nous avons à apprendre.
Ce feedback peut être très précis. Méditer, c’est parfois comme observer sa vie sous un microscope et voir ce sur quoi il nous faut travailler. Quand, pendant la méditation, nous faisons l’expérience de fatigue de façon répétée, cela peut nous apprendre à faire attention à nous-même et à ce qui nous nourrit. Quand notre esprit fait anxieusement des listes de choses à faire et les planifie, nous pouvons y voir un signe qu’il faut que nous soyions mieux organisé dans notre vie quotidienne. Quand nous constatons que nous passons nos méditations à ruminer une chose ou une autre, cela peut nous dire qu’il faut que nous passions du temps à réfléchir. Des discussions internes nous montrent qu’il y a d’importants conflits que nous devons résoudre, que ce soit en pardonnant, en abandonnant nos griefs, ou en résolvant les choses avec une autre personne.
L’idée d’échec en méditation peut profondément vous faire perdre vos moyens. Elle pousse à abandonner. Dans la méditation il n’y a pas d’échec, il n’y a que du feedback. Rappelez-vous ceci : vos difficultés deviendront vos maîtres, vos obstacles deviendront vos points d’appui, et le chemin caillouteux de la méditation deviendra la voie vers une plus grande satisfaction et un plus grand contentement. Apprendre n’est pas toujours facile, mais est toujours bénéfique à long terme. Abandonnez l’idée de l’échec, et embrassez la notion selon laquelle tout ce dont vous faites l’expérience en méditation est du feedback : la voie deviendra alors mille fois plus agréable et enrichissante.